dimanche 30 janvier 2011

Comment les dirigeants veulent "garder la main" sur une Afrique en crise


D'Abidjan au Caire, en passant par Tunis et Juba, le visage de l'Afrique change en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Le sommet des chefs d'État africains réunis à Addis-Abeba devrait aborder ces différentes crises et évolutions.

La multiplication des crises fait presque passer au second plan ce qui devait être l'événement majeur de ce 16e sommet de l'Union africaine : l'avènement imminent d'un 54e Etat africain, le Sud Soudan, qui vient de se prononcer par référendum à une écrasante majorité pour faire sécession du nord du pays.



Première épine de ce sommet : la Côte d'Ivoire, où les deux protagonistes de l'élection présidentielle du 28 novembre continuent à se disputer le pouvoir. L'Union africaine, au diapason du reste de la communauté internationale, avait reconnu la victoire d'Alassane Ouattara dès début décembre, et suspendu la Côte d'Ivoire tant que le président sortant Laurent Gbagbo n'aurait pas cédé la place.

Mais après plusieurs médiations infructueuses, l'UA est forcée de constater que M. Gbagbo n'a rien lâché de son pouvoir, et l'unanimité initialement affichée en faveur de M. Ouattara semble sérieusement se fissurer. A l'issue d'une visite à Abidjan cette semaine, le président sortant de l'UA, le Malawite Bingu wa Mutharika, a promis de présenter au sommet d'Addis les "propositions" de son "frère et ami" Laurent Gbagbo, sans même mentionner le nom de son adversaire.

Et l'entourage du président de Guinée Equatoriale Teodoro Obiang Nguema, appelé à prendre la présidence de l'UA dès ce week-end, a fait savoir que ce dernier "n'était pour personne" dans la crise ivoirienne.

Une réunion ministérielle de l'UA a décidé vendredi de confier à un panel de cinq chefs d'Etat le soin de présenter des décisions "contraignantes" d'ici un mois. Le président de la Commission de l'UA Jean Ping a affirmé samedi que ce panel devait "amener Alassane Ouatarra à exercer la réalité du pouvoir" dans le pays "par la négociation".



L'Union africaine parait en revanche réduite largement à un rôle de spectateur dans la colère populaire qui a provoqué la fuite du président Zine el-Abidine Ben Ali en Tunisie, ou sur les manifestations populaires en Egypte.

M. Ping a évoqué la "préoccupation" de l'UA sur la situation en Egypte, et il a espéré qu'en Tunisie, "la période de transition sera la plus courte possible et qu'elle débouchera sur des élections démocratiques".



Les aspirations démocratiques à l'origine de ces différentes crises donnent un relief particulier au thème officiel du sommet - les "valeurs partagées" de l'Afrique. Mais selon les organisations de défense des droits de l'homme, les valeurs démocratiques de l'UA risquent d'être mises à mal dès l'ouverture du sommet dimanche, avec la nomination d'un nouveau président de l'organisation pour l'année à venir.

Le bloc des pays d'Afrique centrale, à qui revient la charge de présenter un candidat, s'est accordé sur M. Obiang Nguema, au pouvoir depuis un coup d'Etat en 1979, et dont la désignation est "acquise sauf bouleversement inattendu de dernière minute", selon un haut responsable de l'UA.

Mais "le règne d'Obiang sur la Guinée Equatoriale se caractérise par un bilan désastreux en matière de violation des droits de l'homme et de corruption qui, de fait, incarnent l'exact opposé de ce que l'UA cherche à promouvoir sur le continent", estime l'organisation Human Rights Watch.

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